Hier soir, j’étais justement en train de lire le fil intitulé «
Corps démembré : l’horreur à son comble » (je me suis arrêtée à la page 9, car il commençait à être tard) et je suis notamment tombée sur un message de Cibiou, qui disait que « ce rejet épidermique du jugement » était « curieux », puis sur les réponses d’un(e) certain(e) Purification, qui m’a d’ailleurs étrangement rappelé quelqu’un (de sexe masculin) qui participait à un autre forum (je me dis que c’est peu probable, mais il y a tout de même plusieurs points communs : écriture, etc. ; il faut que je lise ses autres messages) :
« Ca n'a rien de curieux. Je vais d'ailleurs te faire la rétrospective complète, en accéléré.
1°) L'Homme vit de vérités empiriques
2°) L'Homme observe les patterns des vérités empiriques et imagine des lois
3°) L'Homme observe les lois et imagine des théories
4°) L'Homme observe les théories et imagine le logos
5°) L'Homme observe le logos et imagine la science
- Nous voilà parvenus à la fin du Moyen-Âge/début Renaissance, selon les régions du globe -
6°) L'Homme observe la science et imagine les notions de méthode scientifique et de vérité épistémique
- Lumières -
7°) L'Homme observe la vérité épistémique et imagine la "science humaine" qui n'a plus de science que le nom.
- XIXème. C'est à partir de là que ça va commencer à déconner -
8°) Confusion des notions de science et de science humaine, de vérité universelle et de vérité épistémique. Accélération du progrès qui perd le petit peuple. Le progrès est maintenant assimilé à la destruction systématique des idoles de l'an dernier, et le but même de la science (établir des vérités générales) devient abstrait. Les super-existentialistes distribuent les bons points.
- 1950-1960 -
9°) Hyper-relativisme mortifère des années 2000 et retour de la "superstition scientifique"
- Aujourd'hui -
10°) Décadence
- Demain – »
« Le rejet du jugement éthique n'est que la prolongation d'un rejet plus large : celui de vérité universelle. Dire "Je trouve que faire ça, ça craint, pour moi, pour lui, pour n'importe qui, y compris les gens que je ne connais pas" est devenu impossible. Non pas parce que l'Humanité est subitement devenue tolérante, mais parce qu'elle remplace le jugement par l'affect, et la recherche du vrai (partant, celles du beau, du bien, de l'absolu) par une rhapsodie infinie de "gut feelings" individuels, comme dirait l'autre. Si bien que quand on ramène des politiciens sur un plateau et qu'on leur passe quelques images de la Syrie, on ne leur demande plus "Que pensez-vous de la situation en Syrie, Madame la Ministre ?" mais "Madame X, vous avez vu les images. Est-ce-que ça vous choque ?". Tout passe par le petit bout de la lorgnette parce que l'idée même de se prononcer dans l'absolu sur autre chose que ses émois et autres états affectifs est perçu comme une intolérable prétention. La notion de "vérité" est ramenée à celle d'opinion, et la notion d'opinion à celle de sentiment immédiat.
Ce "rejet épidermique du jugement" est la conséquence directe d'un univers où il est interdit de dire "Moi, je pense qu'une famille ça devrait être comme ci comme ça, et pas deux vieux pédés qui vivent sur le RSA", ou encore "Ce qui se passe en Syrie ne me choque pas. Mais je pense que c'est contre notre intérêt, voici ce que nous devrions faire/ne pas faire". Dans la première puissance du globe, on propose d'enseigner indifféremment le modèle d'évolution post-darwinien et l'intelligent design dans les facs publiques, au nom du droit à la religion. Que veux-tu bien faire passer comme jugement dans un tel cloaque d'imbécilité ? »
Cela « colle » assez bien avec le sujet du présent fil.