Les articles se rejoignent sur plusieurs points ; notamment sur le fait qu'il est difficile de cerner les contours de ce mot fourre-tout.
« De fait, l’observation du français québécois montre que l’on désigne usuellement comme woke une personne dont le militantisme s’inscrit dans une idéologie de gauche radicale, qui est structurée en fonction de questions identitaires (liées à la race, mais aussi au genre, à l’orientation sexuelle, etc.). » :
C’est ce à quoi je pensais lorsque je faisais référence au « gauchiste +++ » dans ma question (« +++ » = extrémiste). Qu’on le nomme « gauchiste postmoderne » ou « gauchiste identitaire », il est bel et bien radical/extrémiste (et non « modéré ») à vos yeux.
Il y a plein de gauches radicales. Les maoistes étaient radicaux, et les anarchistes également, et quoique de gauche, ils s'opposaient sur presque tous les sujets (notamment sur l'autorité). Or, les deux étaient modernes. Attachés à l'idée d'une réalité objective, qu'il convient de déterminer.
Je suis moi-même ce qu'on appelle un écologiste radical, j'ai participé à fonder et organiser des mouvements militants qui faisaient des gestes illégaux pour défendre la nature. Je pense qu'il faut viser immédiatement une décroissance économique, miser sur la résilience, la décentralisation des pouvoirs et des circuits économiques, et consacrer nos ressources à sauver et réhabiliter tout ce qu'il reste de la nature.
C'est également une posture "moderne" en ce sens qu'elle est fortement liée aux sciences de la Terre et de l'atmosphère et à l'écologie, une branche de la biologie. Elle est aussi héritière des Lumières, notamment d'une des œuvres fondatrice de la pensée des Lumières, le "Dialogue avec un sauvage" du Baron de Lahontan, un aventurier français qui a vécu en Nouvelle France et qui relate la pensée du grand chef huron "Aradio" Kondiaronk, réputé pour sa sagesse et son éloquence. Un ouvrage coup de poing contre l'arbitraire européen qui a fortement influencé Diderot, Leibniz, Rousseau, etc.
Le wokisme est également positionné à gauche et il est indubitablement radical : il rejette l'héritage des Lumière, et réhabilite l'arbitraire, soi disant au bénéfice des marginaux et des infortunés. Ce n'est pas sa radicalité ou son extrémisme qui font réagir. Ce sont justement ses accointances intellectuelles carrément obscurantistes, anti Lumières, et la position qu'il a réussi à occuper en très peu de temps en Amérique du nord dans les grandes institutions publiques et privées.
Et l’individu qui lutte bec et ongles, de manière extrême/acharnée, contre lui est également radical (à mes yeux). La référence à « l’anti-woke extrémiste » visait notamment ceci : « Quand "woke" est prononcé, "il est principalement utilisé par le camp adverse, la droite conservatrice, pour décrédibiliser des militants de gauche" […]. »
Comme je te l'ai dit, le problème de cette mouvance est qu'elle ne se nomme pas. C'est frustrant, pour quelqu'un qui aime les mots et les termes clairs, mais c'est surtout générateur de confusion et de dialogues de sourds. Pourtant, il faut bien pouvoir communiquer. Parlons alors de gauche "culturelle", "identitaire", "postmoderne", "antimoderne", "régressive", ou quoi d'autre?
Une partie de leurs méfaits provient justement de ce jeu de cachecache et d'élastique avec les mots et les expressions.
Par exemple, le terme "suprématie blanche" désigne à strictement parlé, "une idéologie raciste, fondée sur l'idée de la supériorité de ceux parmi les humains dont la peau est perçue comme blanche par les autres ou par eux-mêmes par rapport aux autres humains." On a élargi le sens, pour inclure l'idée de "considérer la civilisation occidentale comme dominante et supérieure aux autres". Les wokes réutilisent le terme pour parler de toutes structure, organisme, domaine académique ou artistique qui comporte une majorité de "blancs". Par exemple les mathématiques, seraient "suprématiste blanc" parce que la majorité des mathématiciens ont la peau pâle. C'est un exemple réel.
Ce sont des mots très lourds de sens. Avec une charge historique haineuse et douloureuse marquée. Et des foules de gens aux É.U. peuvent crier et scander aux porte de divers établissements, surtout des établissements artistiques, culturels, d'éducation, de soins, ou voués au bien commun (les usines d'armement, de pétrole ou les banques sont étrangement épargnées à ce jour!) "White supremacist! White Supremacist!", casser des fenêtres, bloquer des portes, etc. Juste parce qu'il y a une majorité de gens à la peau pâle qui y travaillent.
Bon nombre de personnes (de tous bords) sont contre le déboulonnage de statues, les idées/propos/comportements les plus extrêmes, etc. Toutefois, les individus qui s’acharnent (= ceux qui ramènent tout à cela, etc.) contre celles et ceux qu’ils assimilent à des « wokes » ne sont généralement pas plus modérés qu’eux.
C'est absurde. Imaginons un exemple extrême, mais le néonazi qui brûle des gens sur une croix, on peut dire que c'est extrémiste. On peut aussi dire que c'est extrémiste même s'ils ne fait que publier des pamphlets, non? J'espère qu'on s'entend là-dessus! Mais quelqu'un qui s'acharne contre les néonazis qui publient des pamphlets, qui y passe beaucoup de temps, qu'il les dénonce à la police, etc., est-il obligatoirement un extrémiste??? Il peut très bien être tout à fait "modéré" sur la question, et même être lui-même un peu raciste, mais s'il n'aime pas les idées néonazies, rien ne l'empêche de s'acharner.
Et en fait la plupart du temps, les gens ne s'acharnent pas contre des gens, comme "celles et ceux", mais contre des idées.
« Acharnés » et « modérés » sont deux termes antinomiques, de toute façon.
Non pas du tout. C'est vraiment étrange de penser cela.
Prenons un exemple avec de l'eau chaude et de l'eau froide. Une bassine au milieu. Il y a les extrêmes froids, et les extrêmes chauds. Aucun n'est acharné, l'un met de l'eau bouillante, l'autre des glaçons, le plus extrême possible, mais sans trop de vigueur. Et puis il y a le modéré, lui, il veut l'eau bien tiède, sauf qu'il est vraiment acharné, à chaque instant il mesure la température de l'eau, l'ajuste, essaie de convaincre tout le monde, etc. sans aucun répit.
L'axe de la mobilisation, qui va du démotivé à l'acharné, et l'axe de positionnement politique, qui va du modéré à l'extrémiste, sont vraiment deux axes indépendants. Ils peuvent aller ensemble, dans certains cas de figure, mais pas nécessairement.