la rechute ne survient pas au moment où l'alcoolique prend son premier verre. Il s'agit d'un processus qui débute bien avant que la personne commence à boire.
Avant la rechute, l'alcoolique éprouve de la douleur et de l'inconfort lorsqu'il ne boit pas. Cette douleur et cet inconfort peuvent atteindre un degré tel que l'alcoolique devient incapable de vivre normalement lorsqu'il ne boit pas. C'est le phénomène que les membres AA appellent "l'ivresse mentale". L'inconfort peut devenir à ce point intolérable que l'alcoolique se dit qu'une consommation ne lui sera pas plus dommageable que la douleur de rester sobre.
Les phases qui conduisent à la rechute sont consécutives bien qu'elles ne puissent donner lieu à une quelconque précision quant à la durée de chaque phase.
Phase 1: RETOUR À LA NÉGATION
Difficultés à gérer son stress et à transiger avec ses émotions. La personne devient incapable de reconnaître ce qu'il ressent.
Préoccupation pour son bien-être
L'alcoolique se sent mal à l'aise, apeuré et anxieux. Il lui arrive de craindre de ne pas être capable de demeurer sobre. Ce malaise est passager et ne dure habituellement que peu de temps.
Négation de sa préoccupation
Pour l'aider à supporter ces périodes d'inquiétude, de crainte et d'anxiété, la personne ignore ou nie ses sentiments. Le phénomène de dénégation peut être tellement fort que l'alcoolique n'est pas conscient de ce qui arrive. Même lorsqu'il prend conscience de ses sentiments, ils sont souvent oubliés dès que ceux-ci se sont résorbés. Ce n'est que lorsque l'alcoolique fait un retour en arrière sur la situation qu'il est capable de reconnaître ses sentiments d'anxiété et la négation de ses sentiments.
Phase 2: Fuite et comportement défensif
Au cours de cette phase, l'alcoolique ne veut penser à rien qui risquerait de ramener ses sentiments douloureux et inconfortables. Par conséquent, il évite toute situation ou toute personne qui le forcerait à se regarder objectivement. Lorsqu'on lui pose des questions directes sur son bien-être, il a tendance à se mettre sur la défensive. Les symptômes les plus courants sont:
Croire que "plus jamais je ne boirai"
L'alcoolique se convainc qu'il ne boira plus jamais. La nécessité de suivre un programme quotidien de réadaptation lui semble alors moins important.
Se préoccuper des autres au lieu de lui-même
L'alcoolique ne parle pas directement de ses préoccupations, mais formule plutôt des jugements personnels sur les comportements de ses amis ou de son conjoint.
Être sur la défensive
L'alcoolique a tendance à se défendre lorsqu'il parle de ses problèmes personnels ou de son programme de réadaptation même lorsqu'il n'a pas besoin de se défendre.
Comportement compulsif
L'alcoolique devient compulsif ("accroché" ou "rigide") dans sa façon de penser et de se comporter. Il a tendance à faire les mêmes choses encore et encore, sans raison valable. Il a tendance à contrôler les conversations soit en parlant trop ou en ne parlant pas du tout. Il a tendance à travailler plus que nécessaire et s'implique dans de nombreuses activités. Toutefois, il évite les rencontres plus amicales ou intimes avec les gens.
Comportement impulsif
Quelquefois le comportement rigide est entrecoupé par des gestes irréfléchis ou non maîtrisés. Cela se produit habituellement dans les périodes de stress intense. Ces gestes impulsifs amènent l'alcoolique à prendre des décisions qui vont compromettre gravement sa vie et son programme de réadaptation.
Tendance à l'isolement
L'alcoolique commence à passer plus de temps seul. Il trouve habituellement de bonnes raisons et de bonnes excuses pour demeurer loin des gens. Ces périodes d'isolement deviennent de plus en plus fréquentes et l'alcoolique se sent de plus en plus isolé. Au lieu de réagir en essayant de rencontrer des gens et de s'entourer, l'alcoolique adopte un comportement de plus en plus compulsif et impulsif.
Phase 3 : Genèse de la crise
Pendant cette phase l'alcoolique connaît une série de problèmes liés au fait qu'il nie ses émotions personnelles, s'isole et néglige son programme de réadaptation. Bien qu'il veuille résoudre ses problèmes et fasse beaucoup d'efforts en ce sens, de nouveaux problèmes surgissent dès qu'il en a un de réglé. Les symptômes les plus courants sont :
Voir les choses avec des oeillères
Voir les choses avec des oeillères signifie que la personne voit une partie infime de sa vie sans être capable d'avoir une vue d'ensemble. L'alcoolique voit la vie comme étant constituée de pièces séparées et dissociées. Il se concentre sur une partie sans regarder les autres parties ou sans voir de quelle façon toutes ces parties sont inter-reliées. Cela l'amène parfois à croire à tort que tout est sous contrôle et va bien. À d'autres moments, il ne voit que ce qui va mal. Les petits problèmes prennent des proportions exagérées. Lorsque cela se produit, l'alcoolique en vient à croire qu'il est traité injustement et qu'il n'a aucun pouvoir pour changer quoi que ce soit.
Légère dépression
Les symptômes de dépression commencent à faire leur apparition et à s'installer. La personne a le cafard, se sent triste, apathique, vide de toute émotion. Il arrive souvent qu'elle dorme trop longtemps. Elle est capable de se sortir de ses états d'âme en s'affairant à autre chose et en ne parlant pas de sa dépression.
Perte de la capacité de planifier de façon constructive
L'alcoolique arrête de planifier au jour le jour et pour l'avenir. Souvent pour lui le slogan "un jour à la fois" en vient à signifier qu'il ne doit pas planifier ou penser à ce qu'il va faire. Il accorde de moins en moins d'attention aux détails. Il en vient de plus en plus à prendre ses désirs pour des réalités (comment il voudrait que les choses se passent plutôt que de voir comment les choses sont véritablement).
Ses plans commencent à échouer
Étant donné que ses plans ne sont pas réalistes et qu'il ne prête pas attention aux détails, ce qu'il planifie commence à échouer. Chaque échec engendre de nouveaux problèmes dans sa vie. Certains de ces problèmes ressemblent à ceux qu'il avait lorsqu'il buvait. Il se sent souvent coupable et plein de remords lorsque les problèmes se présentent.
Phase 4 : Immobilisme
Pendant cette phase, l'alcoolique est totalement incapable d'entreprendre une action. Il suit le courant de la vie, il est contrôlé par les événements plutôt que d'être en prise réelle sur sa vie. Les symptômes les plus courants à ce stade sont:
Rêvasser et prendre ses désirs pour des réalités
Il devient de plus en plus difficile pour l'alcoolique de se concentrer. Le syndrome du "si seulement" devient plus courant dans ses conversations.
Sentiment que rien ne peut être résolu
Un sentiment d'échec commence à se développer. L'échec peut être réel ou il peut être imaginaire. De petits échecs sont exagérés et deviennent disproportionnés. L'alcoolique commence à croire "qu'il a fait son possible et qu'il est incapable de rester sobre". .
Souhait immature d"être heureux
Un vague désir "d'être heureux" ou "que les choses se tassent" se développe sans que la personne identifie ce qui serait nécessaire à son bonheur ou de quelle façon elle pourrait arranger les choses. "La pensée magique" est utilisée (vouloir que les choses aillent mieux sans rien faire pour les améliorer).
Phase 5 : Confusion et réaction excessive
Au cours de cette période l'alcoolique est incapable de penser clairement. Il est mécontent de lui et des autres, devient irritable et réagit excessivement pour des riens.
Périodes de confusion
Les périodes de confusion deviennent de plus en plus fréquentes, durent de plus en plus longtemps et engendrent de plus en plus de problèmes. L'alcoolique se sent de plus en plus furieux contre lui-même parce qu'il est incapable d'arriver à comprendre ce qui se passe.
Irritabilité avec les amis
Les relations deviennent tendues avec la famille et les amis. L'alcoolique se sent menacé lorsqu'on lui parle de ses changements de comportement et d'humeur. La personne commence à se sentir coupable et plein de regrets par rapport au rôle qu'il tient dans les conflits qui continuent de s'intensifier malgré ses efforts pour les résoudre.
La personne s'emporte facilement
L'alcoolique passe par des phases de colère, de frustration, de ressentiment et d'irritabilité pour aucune raison réelle. Il réagit de plus en plus souvent de façon excessive pour des riens. La peur que ses réactions excessives ne débouchent sur la violence augmente le stress et l'anxiété.
Phase 6 : DÉPRESSION
Au cours de cette période, l'alcoolique devient tellement déprimé qu'il lui est difficile de maintenir sa routine. Il peut lui arriver de penser à se suicider, à boire ou à faire usage de drogues pour mettre fin à sa dépression. La dépression est grave, persistante et ne peut être facilement ignorée ou cachée aux autres. Les symptômes les plus courants à ce stade sont :
Alimentation irrégulière
L'alcoolique commence à trop manger ou à ne pas assez manger. Il gagne ou perd du poids. Il ne mange plus à des heures régulières et remplace un régime bien équilibré et nutritif par du "fast food".
Absence de désir de passer à l'action
L'alcoolique traverse des périodes où il est incapable de se mettre en marche ou de mener quoi que ce soit à terme. Il est incapable de se concentrer, se sent anxieux, craintif et mal à l'aise. Il se sent souvent piégé et incapable de s'en sortir.
Sommeil irrégulier
L'alcoolique a de la difficulté à dormir, est agité et troublé lorsqu'il s'endort. Il fait souvent des rêves étranges et des cauchemars. Étant donné qu'il est épuisé, il peut dormir de 18 à 20 heures en ligne. Ses "marathons de sommeil" peuvent se produire périodiquement.
Perte de la routine quotidienne
La routine quotidienne est laissée au hasard. L'alcoolique ne se lève plus et ne se couche plus à des heures régulières. Les heures régulières de repas ne sont plus respectées. Il lui devient plus difficile de respecter ses rendez-vous et de planifier ses sorties. L'alcoolique se sent parfois bousculé et surchargé, et à d'autres moments il n'a rien à faire. Il est incapable de mener à bien ses plans et ses décisions. Il éprouve de la tension, de la frustration, de la crainte ou de l'anxiété qui l'empêchent de faire ce qu'il a à faire.
Périodes de grave dépression
L'alcoolique se sent plus souvent déprimé. La dépression s'aggrave, persiste plus longtemps et interfère avec sa vie. Cette dépression est plus sérieuse pendant les périodes non planifiées ou non structurées. La fatigue, la faim, et l'isolement aggravent la dépression. Lorsque l'alcoolique se sent déprimé, il se coupe des autres, devient irritable et furieux contre les autres, se plaignant souvent que personne ne se préoccupe de ce qui lui arrive ou ne le comprend.
Phase 7: Perte de contrôle du comportement
Durant cette phase, la personne devient incapable de maîtriser son comportement personnel et de respecter un horaire quotidien. Le phénomène de négation est encore très fort et l'alcoolique n'est pas pleinement conscient qu'il peut perdre le contrôle. Sa vie devient chaotique et de nombreux problèmes surgissent dans divers secteurs de sa vie et de sa réadaptation. Les symptômes les plus courants sont :
Participation irrégulière aux groupes d'entraide et à son traitement
L'alcoolique arrête d'aller régulièrement aux réunions AA et manque ses rendez-vous de consultation ou de traitement. Il trouve des excuses pour justifier ses absences. Il en vient à penser que "les AA et les consultations ne l'aident pas vraiment à se sentir mieux, pourquoi devrait-il donc en faire une priorité? D'autres choses sont plus importantes".
Développement d'une attitude de "je-m'en-foutisme"
L'alcoolique essaie d'agir comme s'il ne se préoccupait pas des problèmes qui surviennent. Cela lui permet de camoufler ses sentiments d'impuissance et de perte de respect envers lui-même et de confiance en ce qu'il est.
Rejet manifeste de l'aide
L'alcoolique se coupe des gens qui peuvent l'aider. Il les fait fuir par ses crises de colère qui les éloignent; il les critique et les rabaisse ou il s'éloigne discrètement des autres.
Insatisfaction face à la vie
Les choses semblent aller tellement mal que l'alcoolique commence à croire qu'il serait aussi bien de boire et que les choses ne seraient pas pire. La vie semble devenue impossible à gérer depuis qu'il a cessé de boire.
Sentiment d'impuissance
L'alcoolique a de plus en plus de difficulté à se mettre en marche; il a de la difficulté à penser clairement, à se concentrer et à avoir une pensée abstraite; il a le sentiment qu'il ne peut rien faire. Par conséquent, l'alcoolique commence à croire qu'il n'y a pas d'issue.
Phase 8 : Reconnaissance de la perte de contrôle
L'alcoolique cesse de nier la réalité et reconnaît brusquement la gravité des problèmes, à quel point sa vie est devenue incontrôlable et le peu de pouvoir qu'il a pour résoudre ses problèmes. Cette prise de conscience est extrêmement pénible et effrayante. Rendu à ce stade, il est tellement isolé qu'il n'y a plus personnes vers qui il peut se tourner pour chercher de l'aide. À ce stade, les symptômes les plus courants sont :
Apitoiement sur soi
L'alcoolique commence à s'apitoyer et se sert de cet apitoiement pour attirer l'attention de ses amis ou de sa famille.
Possibilité de boire normalement
L'alcoolique réalise que boire ou se droguer l'aiderait à se sentir mieux et il en vient à espérer de pouvoir boire normalement et d'être capable de contrôler sa consommation d'alcool. Il arrive parfois que ces pensées soient tellement fortes qu'il ne peut les chasser de son esprit. Il a alors le sentiment que seule la boisson peut lui éviter de devenir fou ou de se suicider. La consommation d'alcool est alors vue comme une solution saine et rationnelle.
Mensonge délibéré
L'alcoolique commence à reconnaître le mensonge, la dénégation et les excuses qu'il donne, mais il est incapable d'y mettre fin.
Perte totale de confiance en soi
L'alcoolique se sent piégé et submergé parce qu'il est incapable de penser clairement et de passer à l'action. Ce sentiment d'impuissance l'amène à croire qu'il est inutile et qu'il lui est impossible de gérer sa vie.
Phase 9: Réduction des solutions possibles
Au cours de cette phase, l'alcoolique se sent pris au piège par la douleur et son incapacité à s'occuper de sa vie. Il ne voit alors que trois solutions: la folie, le suicide ou le recours aux drogues. Il ne croit plus que quelqu'un ou quelque chose puisse l'aider. Pendant cette phase, les symptômes courants sont :
Ressentiment déraisonnable
L'alcoolique se sent irrité parce qu'il est incapable de se comporter comme il le voudrait. Parfois ce sentiment d'irritabilité est dirigé vers le monde en général, parfois contre quelqu'un en particulier, mais surtout contre lui-même.
Interruption de tout traitement et de toute participation aux rencontres des groupes d'entraide
L'alcoolique n'assiste plus à ses rencontres AA. Ceux qui prennent le "Naltréxone" oublie de le faire ou évitent délibérément de le prendre régulièrement. l'alcoolique ne consulte plus d'aide professionnelle même s'il sait avoir besoin d'aide. Lorsqu'une personne est impliquée dans son traitement, la tension et le conflit deviennent tellement graves que la relation est interrompue.
Sentiment d'être submergé par l'isolement, la frustration, la colère et la tension
L'alcoolique se sent complètement submergé. Il se convainc que la seule façon de s'en sortir est de boire ou de se suicider. Ses craintes de devenir fou sont très fortes de même que les sentiments d'impuissance et de désespoir.
Phase 10: Phase aiguë de rechute
Pendant cette phase, l'alcoolique traverse des périodes où il est complètement incapable de fonctionner normalement. Ses périodes sont de plus en plus fréquentes, durent de plus en plus longtemps et engendrent de graves problèmes dans tous les domaines de sa vie. Il peut boire ou se droguer, et peut devenir non fonctionnel. Les symptômes les plus courants à ce stade sont :
Perte de contrôle de son comportement
L'alcoolique a de plus en plus de difficultés à contrôler ses pensées, ses émotions, ses jugements et ses comportements. Ses pertes progressives de contrôle le rendent inapte. Sa santé et son bien-être en sont affectés. Peu importe les efforts qu'il déploie pour reprendre sa vie en main, cela lui semble impossible.
LA RECHUTE
Le cycle de rechute aboutit à une crise grave qui rend la personne totalement incapable de fonctionner pendant une certaine période de temps, pour l'une ou l'autre des raisons suivantes :
Détérioration de tous les domaines de sa vie
L'alcoolique peut devenir incapable de fonctionner dans son travail, sa vie sociale, sa vie familiale et sa vie intime. Par conséquent, tous les domaines de sa vie subissent le contrecoup de la négligence.
Consommation d'alcool ou usage de drogues
Dans le but d'échapper à la douleur ou au désespoir, l'alcoolique pourra essayer de contrôler sa consommation soit en limitant la quantité qu'il boit ou encore "en faisant la bombe" pendant une courte période de temps. Il perd rapidement le contrôle de sa consommation d'alcool. Cela se produit quelquefois très rapidement, ou peut survenir après une période de consommation contrôlée. L'alcoolique revient à une consommation incontrôlée et éprouve les symptômes qu'il avait éprouvés lors de sa dernière période de consommation.
Effondrement émotif
L'alcoolique devient incapable de fonctionner émotivement. Il peut réagir excessivement ou peut devenir émotivement figé, pleurer ou se mettre dans une violente colère pour aucune raison particulière.
Épuisement physique
L'alcoolique peut devenir incapable de fonctionner en raison de son épuisement physique.
Maladie reliée au stress
L'alcoolique peut tomber malade par suite du stress intense subi pendant une longue période de temps.
Maladie psychiatrique
L'alcoolique peut développer des maladies mentales comme la psychose, l'anxiété grave ou une dépression profonde. Les maladies mentales peuvent être à ce point graves qu'elles obligent l'alcoolique à se faire traiter.
Suicide
L'alcoolique peut devenir suicidaire , tenter de suicider ou effectivement se suicider.
Prédisposition aux accidents
L'alcoolique peut devenir négligent et incapable de prendre les précautions normales dans sa vie, ce qui provoque une série d'accidents.
Perturbation des structures sociales
L'alcoolique peut être incapable de participer aux activités normales de la vie et il peut devenir incapable de fonctionner en société.