La réussite de l'épreuve est nécessaire à l'obtention du diplôme. Donc si un étudiant "coule" l'épreuve, il doit la refaire et ne peut normalement pas être admis à l'université (pas si l'admission se fait sur la base de l'obtention du diplôme collégial). Peut-être que ton université date d'avant ça Berslak?
(Mais il me semble que ça date de 1996. Si tu as fini le cégep avant ça, tu devais être vraiment dans les derniers milles de l'ancienne épreuve.)
La réalité, pour les correcteurs ministériels, c'est qu'on se fait mettre de la pression pour que les seuls échecs qu'on laisse passer soient des échecs cuisants, qui ne peuvent être remis en question. Les deux centres de correction doivent maintenir un seuil de passation d'au moins 80% des étudiants (mais idéalement 85%), parce que sinon, tu maintiens dans le réseau des étudiants prêts pour le marché du travail (et tu nuis à l'économie) et tu prives le réseau universitaire d'étudiants qui doivent changer de réseau, ce qui coûte cher au collégial (parce que les étudiants sont très subventionnés au cégep et que tu ne veux pas les maintenir à l'école pour une session s'ils n'ont rien à faire là) et aux universités, qui sont privées des subventions établies en fonction du nombre d'inscriptions.
Un étudiant qui "échoue" l'épreuve (auquel le correcteur n'attribue pas la note de passage dans l'un ou l'autre des volets de l'EUF) va passer en supervision (un superviseur va "réviser" les échecs d'une quinzaine de correcteurs environ), et si un superviseur n'arrive pas à 1) rescaper l'élève en agglutinant des fautes de grammaire et en les regroupant sous le même code de correction pour qu'elles ne comptent plus - parce que partant du fait que si un élève ne met pas (exemple) de virgule devant un coordonnant, il ne sait pas qu'il doit y en avoir une, on ne pénalisera pas chaque cas mais juste une fois ou 2) à le couler plus violemment en trouvant de nouvelles fautes d'orthographe ou en étant plus sévère sur l'argumentation, il va devoir faire repasser le copie par le directeur du centre de correction. Donc tous les élèves qui ne sont pas des cancres sont en général rescapés soit en supervision, soit au niveau de la direction, à moins qu'on puisse finalement les classer dans la catégorie des cancres.
Comme tout ce travail de supervision est quand même demandant, il y a toute une mécanique complexe pour que les correcteurs engendrent le moins d'échecs possible. D'abord, couler un étudiant sur le plan de l'argumentation est quasiment impossible à moins qu'il ne parle pas du tout du texte (mais s'il le nomme sans vraiment en parler, et que ses divagations sont quand même vaguement littéraires, il risque de passer en contenu quand même) ou de ne pas rédiger une dissertation critique. Ensuite, au niveau de la langue, si une source existe pouvant justifier une erreur orthographique (ex: le dictionnaire dit qu'un des sens de la préposition "pour" est "contre" (!!) comme dans "du sirop pour la toux", si un étudiant utilise la préposition "pour" pour dire "contre" dans un sens absolument pas rapport - j'ai pas d'exemple en tête parce que c'est vraiment absurde comme idée - bien on va lui supprimer les fautes que le correcteur aurait normalement signalées en disant "bien voyons, ça pas de sens ça! ... et là, c'est un exemple du Larousse, mais y'a des osties de linguistes comme Grevisse ou Hanse qui discutent de TOUS LES CAS POSSIBLES de l'humanité, incluant tous les régionalismes possibles, et qui disent "ah bien ça, dans tel contexte, ça pourrait se dire" - et si c'est écrit dans le Hanse, bien on va enlever la faute, parce que SI JAMAIS un étudiant demandait à voir sa copie et pouvait prouver qu'il a lu quelque part que ça s'écrivait de même, bien là, on serait dans le tort), bien on ne corrigera pas la faute. Les codes de correction sont regroupés et l'utilisation du "chapeau" pour signaler une faute répétitive va faire en sorte qu'on ne corrigera que la première incidence, donc beaucoup de fautes sont échappées ainsi. Aussi, la construction du code de correction donne le même poids à des critères genre "l'élève peut écrire une introduction et une conclusion" et des choses comme "l'étudiant possède des connaissances littéraires". Oh, pour "maîtriser" des connaissances littéraires, il faut qu'il y ait UNE référence à une œuvre qui n'est pas étudiée dans le cadre de l'examen. Que la référence soit pertinente ou non. Même chose pour les figures de style. L'étudiant doit en nommer une. S'il n'a pas identifié la bonne, ou si elle n'a pas rapport (genre, y'a une énumération, mais elle ne sert à rien dans le texte...), on sanctionne le critère quand même. En clair, sur les trois critères de contenu, le critère "structure" (est-ce qu'il y a une introduction, un développement et une conclusion) vaut autant que le critère argumentation (soit la façon de répondre à la question posée). Si tu as physiquement une intro et une conclusion, et que tes paragraphes barbotent quelque chose à propos du texte, tu passes le critère structure, ce qui "vaut" autant dans le calcul du contenu que la façon intelligente ou non que tu as de résoudre le problème posé.
Tout ça parce qu'on sanctionne le seuil, et non la performance. Pour réussir l'EUF, il faut démontrer que tu possèdes le minimum de compétences requises dans chaque critère. Si tu as le minimum-minimum partout, tu passes. Est-ce que ça fait de toi quelqu'un qui maîtrise le français et les connaissances littéraires, avoir le minimum dans chaque critère? Nope. Mais tu passes.